Le diable est dans les détails

« La règle des 10 000 heures ». En avez-vous déjà entendu parler? C’est une théorie qui a été popularisée par Malcolm Gladwell. Il écrit dans son livre, Outliers, que 10 000 heures ou dix ans sont nécessaires pour devenir un maître d’envergure mondiale dans n’importe quel domaine. Cette affirmation est-elle vraie ou pas? L’expérience et le succès ont tendance à aller ensemble, et si vous connaissez Jason Parker de Jason Parker Race Cars, vous ne pouvez pas vous empêcher de croire que c’est vrai. 

Jason est un constructeur de motos personnalisées. Plus précisément, il est bien connu pour la construction de choppers et il en construit depuis plus de vingt-cinq ans. « Lorsque j’ai ouvert mon atelier, j’étais le gars qui construisait des voitures de course et des hot rods, mais qui ne travaillait sur des motos que dans ses temps libres. Maintenant, je suis le gars qui construit des motos et qui travaille sur des voitures dans ses temps libres », dit Jason en ricanant. L’atelier (JasonParkerRaceCars.com et @panheads_forever sur Instagram) est situé à Brampton en Ontario. Pour les passionnés de têtes motrices, c’est un véritable paradis de motos, cadres, moteurs, et voitures anciennes. Non seulement Jason construit ses motos, mais en plus il est connu internationalement pour son travail de fabrication et de moteur impeccable très recherché par les autres constructeurs de motos. Il préfère construire des motos de la fin des années 60 et de plus anciens Panhead, Knucklehead, et Shovelhead. Son objectif vise toujours à garder ses constructions dans la « bonne période », mais avec le plus haut degré de finition, de correspondance et de travail de fabrication irréprochable. Les constructions finales sont fidèles à l’époque, mais meilleures que celles que vous auriez vues au cours de cette période. Jason est un vrai maniaque des détails et de l’artisanat, et c’est le fruit de plusieurs années passées à faire ce qu’il fait de mieux, sans compromis. 

Avant de construire cette moto, Jason traversait une période difficile en raison de divers problèmes personnels et de santé qu’il devait gérer à l’époque. Il venait tout juste d’obtenir son passeport, et il partait pour ses toutes premières, et les seules, vacances de sa vie. Quatre jours de repos et de relaxation bien mérités ainsi qu’une baignade dans l’océan ont procuré un répit à son corps et son esprit. C’était exactement ce que son médecin lui avait prescrit. Il est revenu complètement reposé, revitalisé, et il a décidé d’exprimer sa nouvelle énergie en construisant un chopper Panhead. 

Comme pour tous les grands créateurs et artistes, l’inspiration peut, et doit, provenir des endroits les plus inattendus. Pour les artistes, l’inspiration trouve habituellement sa source hors des sentiers battus, et ainsi, ils peuvent créer quelque chose qu’ils ne pourraient pas normalement. Prenons ce Shovelhead par exemple. L’idée initiale pour cette moto est née d’une vieille photo en noir et blanc d’un type évanoui et penché sur un chopper Flathead. Il est difficile de savoir si Jason a tiré son inspiration de la composition globale de la photo, ou si elle provient plutôt de la moto elle-même. Néanmoins, ce qui est intéressant à propos de cette construction, c’est que la moto de la photo ne ressemble même pas à celle que Jason a fini par assembler. Cependant, il y a certaines ressemblances, comme la suspension avant à ressorts et un petit réservoir avec un design excentrique. Ce sont d’ailleurs probablement les seules ressemblances qui ont engendré l’inspiration qui a mené à cette construction. Les voies de l’esprit créatif sont impénétrables. 

Le Shovelhead construit en 2012 est tout aussi pertinent aujourd’hui qu’il l’était le jour où il a été terminé, il y a près de huit ans. Même si Jason construit des motos comme celles-là depuis le début de sa carrière, celle-ci en particulier est principalement responsable de l’attention extraordinaire que son atelier a suscitée dans la province. Le style de la moto, le niveau de finition, l’artisanat, et la combinaison du moteur Shovelhead avec le cadre Panhead la faisait vraiment sortir du lot. Il en a construit plusieurs autres depuis ce temps pour des clients qui avaient vu et adoré l’apparence de cette moto. 

Au départ, Jason pensait au moteur et au cadre Panhead 1953 pour la nouvelle moto. Au moment où il enveloppait ses gros bras autour du moteur Panhead qu’il avait choisi, le Shovelhead de la fin des années 70 a attiré son attention. Avec son énergie créatrice renouvelée, il a décidé, sur place, de suivre son instinct et de choisir le Shovelhead pour alimenter sa nouvelle construction. Il se souvient que son ami Trevor lui a dit : « Hé, qu’est-ce que tu fais? Tu as pris le mauvais moteur. » Jason n’a pas répondu et il a commencé à manipuler et à manœuvrer le moteur en place dans la cadre. Il a immédiatement adoré l’apparence et la ligne du moteur Shovelhead conique dans le cadre en triangle Panhead et il a rapidement répondu : « Merde, c’est vraiment beau! Je vais faire ça. » 

Toutes les étapes de la construction manuelle de cette moto se sont passées comme dans un rêve en raison de l’état d’esprit créatif dans lequel il se trouvait. Tout semblait se mettre en place facilement et il ne lui a fallu qu’un mois pour la terminer, sans les touches finales. Jason est devenu fou avec la reconstruction de bout en bout du moteur, comme c’est toujours le cas, y compris la tête et les carters polis, solidifiant sa réputation pour la construction de moteurs fiables et robustes. Pratiquement toutes les pièces de cette moto ont été retravaillées, fabriquées, ou lourdement modifiées selon sa volonté, jusqu’à chaque boulon. Qu’elles soient en chrome ou en acier inoxydable, il a personnellement limé et poli chaque pièce pour qu’elles correspondent à son haut niveau de perfection. 

Prenons le dossier surélevé par exemple. Il n’a pas construit 3 ou 4 versions pour obtenir la bonne apparence, il n’a fait qu’un seul essai et, BOUM! Il était parfait pour l’apparence de la moto. La même chose s’est produite avec les tuyaux d’échappement personnalisés faits à la main avec des extrémités Cocktail Shaker. Le réservoir à essence Wassel peanut génial des années 60 avait également été lourdement modifié. Comme il le fait toujours, il avait déplacé le minirobinet vers l’arrière du réservoir, puis coupé le tunnel en changeant la forme de celui-ci pour optimiser l’espace d’alimentation en carburant. Il voulait que l’apparence finale de la suspension avant à ressorts soit celle d’une suspension de série, mais elle ne l’était pas. Elle était composée d’un tas de pièces découpées à partir de différentes suspensions avant à ressorts Knucklehead qu’il avait ramassé et conservé au fil des années. Il avait ensuite fabriqué de nouvelles plaquettes pour assembler l’ensemble en une seule pièce. Les guidons ont probablement représenté le plus gros défi, dans le sens où leur aspect ne correspondait pas immédiatement à celui de la moto. Lorsqu’il a finalement trouvé l’allure qu’il voulait pour les guidons, il les a également fabriqués sur mesure. Il y a posé des appuis surélevés personnalisés pour donner l’impression qu’ils étaient détachables alors qu’ils étaient en fait soudés ensemble. Ce ne sont pas des guidons typiques pour un chopper, mais Jason les aimait et jusqu’à ce jour, il dit qu’ils sont les guidons les plus confortables qu’il ait jamais utilisés. Comme Jason dit : « Je n’oublierai jamais la satisfaction naturelle que m’a procurée l’assemblage en douceur de cette moto. ». 

Les touches finales apportées à la moto ont été complétées par un travail de chrome incroyable effectué par Metal Coaters, à Brampton. La peinture, simple, sans artifice, mais brillante, a été réalisée par Matt Black Paint. Jason rêvait de réaliser depuis très longtemps ce schéma de peinture, une moto entièrement peinte en noir brillant avec une seule flamme orange dont le contour est dessiné par de fines rayures blanches (par Rollie Guertin). Le résultat était exactement comme il l’avait imaginé. Les petites attentions comme la peinture orange en paillettes, un restant de peinture provenant d’une ancienne moto Panhead 1962 qu’il avait déjà construite, contribuent à la nature personnelle de chaque construction pour Jason. 

Lorsque vous examinez les créations de Jason, vous remarquez que toute l’attention portée aux détails (qu’ils soient visibles ou non), tout le travail d’artisanat et de correspondance constituent un travail de qualité irréprochable. C’est parce que lorsqu’il réalise un travail, il adopte une approche claire et réfléchie, non négociable. Lorsqu’il construit, sa devise consiste à « exercer de la retenue en portant une attention extrême aux détails ». Jason ne se laisse pas séduire par la mode passagère, et il n’ajoute pas d’accessoires ridicules simplement pour le plaisir. Au lieu de cela, ses constructions demeurent épurées, avec le style authentique de l’époque dans la mesure du possible, et toujours mécaniquement robustes. Jason a une sainte horreur des motos qui affichent une belle apparence, mais qui ne sont pas fiables. Il dit : « Les motos sont construites pour être conduites ». Par conséquent, Jason éprouve la plus grande satisfaction lorsqu’il voit ses motos sur la route, aussi puissantes que jamais, et conduites par les mêmes propriétaires qui ont acheté leur moto avec le même sourire de « mange-merde » sur leur visage. Parce que, avouons-le, lorsque vous vous procurez une machine comme celle-là, vous n’avez pas envie de vous en débarrasser. Alors si vous faites partie des privilégiés qui possèdent une moto Jason Parker, vous êtes un fils de pute foutrement chanceux. 

En passant, la moto en page couverture du numéro de ce mois-ci de Revolution Mag est le chopper Shovelhead de Jason, qui présente aussi la superbe modèle, @ToxicVision, qui semble diablement séduisante, ne pensez-vous pas? Elle est aussi une motocycliste dure à cuire et une cliente de Jason Parker Race Cars. 

Alors vous voyez, le diable est vraiment dans les détails.

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