ROAD TRIP STYLE CAJUN

J’ai le privilège de joindre un groupe de 13 motards pour deux semaines de route au cœur de la culture cajun. Je voyage dans un Dodge Ram qui tire quatre motos. Il fait partie d’un convoi qui se dirige vers le sud. On change de conducteur aux 300 km. C’est la première fois de ma vie que je conduis un pickup qui tire un aussi gros trailer.

Le départ

On se rejoint tous dans le stationnement en gravier du concessionnaire Harley Davidson à Jackson au Mississippi. Aujourd’hui, sous un soleil de plomb, on détache des dizaines de courroies et on libère les motos. On laisse les véhicules ici, dans la cour arrière du dealer. Ça marque le début de neuf jours sur la route.


The Natchez Trail

On the first evening, we relaxed over cocktails and supper at the Olive Garden in the neighbouring mall that turned into a parking lot party at the Motel 6 along I-55. The next morning, we took the Natchez Trail Parkway, a road that stretches from Nashville, Tennessee to Natchez, Mississippi, commemorating the old Natchez Trace from the 17th and 18th centuries. We only travelled the last section and arrived at the City of Natchez.

By the end of the morning we reached the gigantic Americana Queen, one of the many steamboats that ferry tourists along the Mississippi, and stopped at the Hilltop Club in Natchez, the bar where Jerry Lee Lewis played his first piano concerts. That night we slept in Baton Rouge.

La Natchez Trail

Notre première soirée, l’apéro s’étire et le souper au Olive Garden dans le centre d’achat voisin se  transforme en party de stationnement au Motel 6 en bordure de la I-55. Au matin, on emprunte la Natchez Trail Parkway, une route qui s’étend de Nashville, Tennesse à Natchez, Mississippi, et qui commémore l’ancienne Natchez Trace qui date du 17e et 18e siècle. On ne fait que la dernière portion et on rejoint la ville de Natchez.

On termine l’avant-midi devant le gigantesque Americana Queen, un des nombreux bateaux-vapeurs à sillonner le Mississippi à grand coup de croisières touristiques et on s’arrête au Hilltop Club de Natchez, le bar où Jerry Lee Lewis a obtenu ses premiers contrats au piano. Ce soir, on couche à Bâton Rouge.

Crazy Nouvelle-Orléans

La route entre Bâton Rouge et la ville la plus festive de la Louisiane se conclut par la longue et angoissante traversée du Lake Pontchartrain Causeway, un pont long de 38 km. Sans voir l’autre rive, on a l’impression d’avancer vers nulle part. Avec les violentes bourrasques de vent et le garde-fou anormalement bas, j’ai plus de chance de finir ma journée dans l’eau froide du lac Pontchartrain que dans le French District avec un drink Hand Grenade dans les mains en collectionnant les colliers de fausses perles.

À part ses impressionnants cimetières hors-sol, son Superdome, ses poupées voodoo et le meilleur sandwich au jambon du monde au Mother’s, qui dit New Orleans dit carnaval et Mardi Gras. Le quartier le plus chaud de la ville, traversé par la Bourbon Street, reçoit les fêtards jour et nuit. Les musiciens sont partout et prennent en otage les coins de rue amenant avec eux une énergie juvénile et contagieuse. Pendant 48 heures, les treize autres motards et moi, on se fond dans la masse à grands coups de karaoké, verres de bière par chers et lancés du collier. Let the good times roll, qu’ils disaient.


Le bout d’un monde

Après un arc-en-ciel de bon temps à New Orleans, l’idée était de rouler vers le point le plus au sud de la Louisiane accessible par la route. Après avoir traversé le Mississippi, entre les innombrables usines, une route étroite se fraye un chemin à travers les eaux vaseuses. On s’attendait à un belvédère qui donne sur la mer, un point de vue magnifique qui s’ouvre sur le golf, un gift shop et un stand à hotdog, on a tous été un peu déçu. Une chaloupe dans les herbes hautes, un boat-house abandonné et une vieille affiche qui nous confirme que c’est ici le point le plus au sud de la Louisiane.

Après la photo officielle, on s’arrête à Venice. Si à première vue, on peut croire à un lieu de villégiature, avec ses luxueux condos et ses bateaux de pêche en haute mer, on désenchante quand la serveuse du seul restaurant de l’endroit nous recommande de manger à l’intérieur plutôt que sur la terrasse parce que « le vent est du mauvais bord et ça pousse les vidanges du dépotoir par ici ». Coup d’oeil à droite, il y a bel et bien une immense montagne de déchets sur laquelle s’affairent trois bulldozers. C’est pourtant ici que je déguste le meilleur steak de thon de ma vie.

On reprend la route vers le nord, en direction de Houma. La 23, très mal entretenue, a raison de l’essieu du petit trailer d’un des membres du groupe. Grâce au sang-froid du pilote et aux réflexes samouraï de ceux qui le suivent, le pire est évité. On se retrouve malgré tout avec une roue en moins sur une remorque, au fin fond de la Louisiane. Quatorze motards qui cherchent la roue dans les fossés, un pompier en pickup qui s’arrête, un soudeur qui interrompt un repas en famille pour ouvrir sa shop, une journée écourtée, la roue réparée et le père du pompier qui nous invite pour une tournée générale à son bar, pas très loin de là. C’est aussi ça la Louisiane.


Police et épices cajuns

En direction de Houma, une visite toute simple à Gretna pour profiter d’un point de vue différent sur New Orleans, de l’autre côté du Mississippi, transforme les plans de la journée. Une policière en congé vient à notre rencontre et s’offre de nous escorter jusqu’au au Jean Lafitte Park, une destination qui ne faisait pas partie de notre liste initiale. Cet arrêt marque nos premiers pas dans les bayous louisianais.

La vraie cuisine cajun, c’est chez Boudreau & Thibodeau qu’on la goute. Le coloré restaurant en bordure d’Houma a pignon sur rue entre des roulottes délabrées et des maisons mobiles toujours pas remises des derniers ouragans. C’est trop dispendieux et trop touristique, mais on plonge quand même dans les sceaux d’écrevisses, les mijotés d’alligator et les assiettes de viandes rehaussées du fameux mélange d’épices orangé avant d’atteindre New Hiberia pour la nuit.

Si moi je voulais visiter l’usine Tabasco à Avery Island le lendemain, la force du nombre nous amène plutôt à St-Martinville pour photographier le Chêne d’Évangéline. Le petit village, traversé par une parade du Mardi Gras, nous garde captifs pendant deux heures. Le long du trajet, les familles s’affairent à préparer pilons de poulet, ribs et côtelettes sur des BBQ de fortune au son d’un hip-hop transcendant. Une odeur de viande grillée s’étend d’un bout à l’autre du boulevard. Curieux de nous voir débarquer chez-eux, les gens nous saluent, les enfants courent vers nous et nous demandent d’être pris en photo.


Monsieur Leblanc et Jacqueline

On s’arrête au lac Martin pour rencontrer celui qu’on appelle M. Leblanc. Frisant les 90 ans et s’exprimant avec un français au fort accent acadien, il nous fait monter à bord de sa chaloupe pour une longue balade dans les bayous, nous fait gouter à son Moonshine homemade trop fort en alcool et nous approche à quelques bras de distance d’alligators longs comme des voitures.

Il nous recommande d’aller diner au Chez Jacqueline, la seule option pour manger à des kilomètres à la ronde. En train de fermer son restaurant puisque nous sommes en plein milieu de l’après-midi, la proprio nous fait la faveur de rouvrir tout spécialement pour nous, à condition de la laisser nous fabriquer un repas avec ce qui lui reste en cuisine. Cette femme, arrivée à Beaux-Bridge il y a plus de quarante ans, nous parle de son enfance à Versailles, mais reste nébuleuse sur les motifs qui l’ont amenée si loin de sa France natale. Soupes, poissons, volailles, tout y passe sans qu’on ait un mot à dire, ni sur la bouffe, ni sur le prix. Elle se permet de facturer des montants clairement exagérés…


Bouffe de dépanneur

C’est un matin glacial et pluvieux auquel on doit survivre pour se rendre à la frontière du Texas via la 82 en longeant le Golfe du Mexique, ses plages interdites au public à cause du pétrole et ses nombreuses plateformes de forage au large. Gelés, trempés, épuisés et affamés, on s’arrête dans un tout petit dépanneur à Cameron qui sert aussi de la pizza en take-out seulement. On s’installe confortablement entre les allées de chips et de pintes d’huiles pour une bonne heure, se refaire des forces, se réchauffer et manger. Le caissier, il comprend plus ou moins ce qui se passe.

On arrête ensuite les motos à Beaumont, au Texas, pour deux jours de démesure: steaks immenses, pickup aux pneus surdimensionnés, cornes de bœuf sur les pare-chocs et bottes de cowboy trois couleurs.


Général Lee chez Big Daddy

Au moment de rentrer vers Jackson, on fait un arrêt à Alexandria pour visiter la vedette des prêteurs sur gages : Big Daddy, de l’émission Cajun Pawn Stars. Généreux de son temps, l’homme à la coiffure qui résiste au vent nous raconte pendant près de deux heures l’origine de certains de ses plus impressionnants items, tous à vendre à des prix qui ne se répètent même pas. On termine la visite avec la voiture du General Lee, l’originale, qu’il accepte de sortir du garage malgré la pluie. Tour à tour, on s’assoit au volant du Charger 1969 de la série télé Duke of Hazard pour une photo, tandis que Big Daddy choisit un CVO Breakout appartenant à un des membres de notre groupe pour sa photo souvenir à lui.

On rejoint Jackson par la superbe route 84 et on roule les derniers kilomètres sur l’autoroute. Le temps orageux et anormalement froid pour cette période de l’année nous ralentit et on doit arriver au concessionnaire Harley Davidson avant la fermeture pour récupérer les pickups. Le soir même, le groupe se sépare pour reprendre la route vers Montréal.

 


Des rencontres exceptionnelles

On visite la Louisiane pour son histoire, son passé de productrice de coton, pour le fleuve Mississippi qui la traverse d’un bout à l’autre, pour ses bayous ou pour ses burgers d’alligator servis avec un bucket d’écrevisses rouge vif.

Ce n’est pas tout. Le cœur gros comme le Golf du Mexique et fiers de leur coin de pays, les Louisianais n’ont jamais hésité à faire un bout de route avec nous. Après neuf jours à parcourir la Louisiane sur nos motos, on comprend que cet état du sud des États-Unis, on le visite surtout pour ces gens qui un à un, ont écrit l’histoire avec nous.

Acheter maintenant